Éoliens et «Celtes sans filtre»

Plan Stratégique de l’Énergie Éolienne de la Galice (PEEG)

En 1996, le «Projet de Gestion Éolienne de la Communauté Autonome de la Galice», également connu sous le nom de «Plan Stratégique de l’Énergie Éolienne de la Galice», a été soumis pour consultation au «Conseil Galicien de l’Environnement» (alors COGAMA, aujourd’hui COGAMADES). Le représentant de la SGHN au COGAMA était membre de la commission de travail non permanente créée à cet effet pour évaluer le PEEG et proposer un avis à l’assemblée plénière du COGAMA.

De manière incompréhensible (ou non), les membres de la Commission de travail n’ont eu accès qu’à un seul des onze volumes du PEEG : les conclusions. Le représentant de la SGHN a demandé que tous les membres de la Commission de travail aient accès aux onze volumes. Il lui a été répondu qu’il n’était pas possible de fournir une copie étant donné le grand nombre de volumes et de pages du PEEG.

Volume des conclusions du PEEG

Compte tenu du seul volume du PEEG consultable, en vertu du droit d’accès à l’information environnementale, la SGHN a demandé le 11-07-1996 au «Ministère Regional de l’Industrie et du Commerce» des informations sur:

  • Les critères qui ont conduit à confier l’élaboration du PEEG à l’entreprise privée APASA-GAMESA, au lieu de le faire par ses propres moyens et/ou avec l’aide extérieure des universités et des centres de recherche de Galice.
  • Les mesures adoptées pour sauvegarder l’intérêt public galicien et empêcher APASA-GAMESA d’être juge et partie dans le PEEG parce qu’elle s’était vu octroyer pas moins de 600 MW, soit 22 % de toute la puissance approuvée jusqu’alors.
  • Les critères objectifs de qualité pour accepter le document soumis par APASA-GAMESA, parce que son énorme volume (11 volumes) ne correspondait pas du tout au contenu rare, médiocre et décevant du volume de conclusions (le seul auquel l’accès a été accordé): 9% de pages blanches, 14% de couvertures, 65% avec une moyenne de 87 mots/page (équivalent à 7-8 lignes de texte) et 13% de tableaux, dont près de la moitié contenait des informations répétées et redondantes.
  • Le coût économique du contrat avec APASA-GAMESA pour l’élaboration du PEEG.
L’impact des parcs éoliens dans le paysage est évident

Protection du “Valedor do Pobo”[1]

N’ayant reçu aucune réponse du Secrétariat, la SGHN a demandé et obtenu la protection du Médiateur qui, après des tentatives successives, a réussi à amener le Secrétariat à répondre à la SGHN en mai 1998 (près de 2 ans plus tard) en rejetant la demande d’information au motif qu’elle n’était pas liée à l’environnement. La SGHN a ensuite contacté tous les groupes politiques représentés au Parlement galicien pour demander les informations demandées sur le PEEG. Personne n’a répondu.

Un coup de vent d’éoliennes?

Au tournant du siècle, l’accès à l’information environnementale s’est amélioré et, depuis 14 ans, la SGHN fait partie des entités auxquelles le ministère régional de l’environnement (parfois aussi d’autres ministères) demande un rapport sur les effets prévisibles des projets sur l’environnement au cours du processus de consultation préalable à l’information du public. En ce qui concerne l’énergie éolienne, il faut dire que la prolifération des parcs éoliens n’est pas un problème de 2021, mais un phénomène qui s’est manifesté au cours des 20 dernières années. Par exemple, en 2011, il y avait déjà une véritable «tempête» de projets éoliens (107 parcs éoliens, 2 nouveaux par semaine), dont plusieurs dans la Réserve de Biosphère de Terras do Miño, ce qui a conduit la SGHN à s’adresser au Comité Espagnol des Réserves de Niosphère. Les chiffres ont également été élevés en 2020 (45 parcs) et jusqu’à présent en 2021 (25 parcs, avec jusqu’à 3 nouveaux parcs par semaine).

Au total, depuis 2011, la SGHN a déposé 274 plaintes/réclamations contre 196 nouveaux parcs éoliens ou extensions/améliorations de parcs existants. Pour toute organisation environnementale telle que la SGHN, qui réalise son travail bénévolement, participer à ces procédures est un véritable défi, surtout lorsque les projets s’accumulent et coïncident dans le temps, comme cela s’est produit et se produit actuellement avec les éoliennes. Au-delà de ce travail de l’ombre et des nombreuses heures consacrées à l’analyse de chacun des projets, la SGHN a établi un document minimum requis pour l’installation de parcs éoliens.

Zones de Développement Éolien approuvées par le gouvernement régional de la Galice
Taille des nouveaux modèles d’éoliennes

Renouvelable, oui, mais durable et souhaitable?

En regardant l’image ci-dessus, un superpétrolier contre un parc éolien, peu de gens auraient un doute sur la source d’énergie qu’ils préfèreraient. Pétrole = énergie fossile non renouvelable, gaz à effet de serre, marées noires, pollution. Vent = énergie renouvelable et beaucoup plus propre mais, est-elle toujours acceptable d’un point de vue écologique? La réponse dépend de l’endroit où les éoliennes sont installées. Le parc éolien de la photo se trouve probablement dans l’un des pires endroits au monde: Tarifa, dans le détroit de Gibraltar, où des millions d’oiseaux sont obligés de passer deux fois par an lors de leurs migrations entre l’Europe et l’Afrique, dont des centaines de milliers d’oiseaux planeurs (cigognes, aigles, pygargues,…) qui ont plus de mal à éviter les pales des éoliennes.

En Galice, certains parcs éoliens ont déjà eu un impact sérieux sur des espaces naturels, comme les tourbières de la ZEC Serra do Xistral, et provoquent une mortalité d’oiseaux et de chauves souris pour laquelle il n’existe pas de statistiques officielles (ou qu’ils ne veulent pas donner à la SGHN).

Parc éolien dans la ZEC Serra do Xistral
Buse variable (Buteo buteo) mort par impact contre une éolienne

Réponse au dilemme des «Celtes sans filtre»

En 1983, Méndez Ferrín et Artello Teatro ont créé l’oeuvre de théatre «Celtes sans filtre», dans lequel les autorités civiles, militaires et religieuses débattaient de l’opportunité d’exploiter ou non un gisement de pétrole récemment découvert sous le Portique de la Gloire à la cathedrale de Saint-Jacques de Compostelle. Près de 40 ans plus tard, aucun «or noir» n’a été découvert à Saint-Jacques ni dans le reste de la Galice, mais beaucoup sont à la recherche d’un “or aérien”. Que penseraient les auteurs de «Celtes sans filtre» si l’on envisageait d’installer dans chaque tour de la cathédrale un macro-aérogénérateur ?

Simulation des nouvelles éoliennes sur les tours de la cathédrale de Santiago, depuis l’une des vues les plus emblématiques de la cathédrale

Pour la SGHN, la réponse est très simple: aucun projet énergétique qui détruise ou mette en danger la cathédrale de Santiago ou le reste de notre patrimoine culturel ne serait acceptable. Mais tout aussi inacceptable est tout projet qui menace l’une des «cathédrales» de notre patrimoine naturel. C’est pourquoi la SGHN exprime son soutien à toutes les personnes et organisations qui font actuellement preuve d’esprit critique face à la tempête qui s’annonce. La SGHN rappelle la nécessité de rationaliser la consommation et de privilégier les économies d’énergie et l’efficacité énergétique dans tous les domaines et s’engage en faveur des énergies propres, mais PAS COMME ÇA !

Le «toit de la Galice» à Pena Trevinca était également menacé par un parc éolien

[1] Le Valedor do Pobo est le haut commissaire du Parlement de Galice pour la défense, dans le cadre territorial de la Communauté autonome, des droits fondamentaux et des libertés publiques reconnus dans la Constitution et pour l’exercice des autres fonctions qui lui sont attribuées par cette loi.

[2] Les “Celtas” (Celtes) sans filtre étaient les “Gauloises” espagnoles.

Text traduit par Lucía Villaverde Rey (étudiante du Degré de Traduction et Interprétation de l’Université de Vigo).